jeudi 25 mars 2021

La pile à Combustible

 

Le dihydrogène et la mobilité

Le véhicule électrique

Le véhicule électrique à batterie et le véhicule électrique à pile à combustible fonctionnant au dihydrogène constituent une solution à zéro émission mais pour l’instant en grande majorité uniquement du réservoir à la roue (émissions générées par le véhicule seul). La raison vient du fait que production de dihydrogène dans le monde est à 96% carbonée, car elle provient de gaz fossile, issue du craquage du méthane.

La fabrication d’électricité dans le monde (en 2018) est issue du pétrole, du gaz, et du charbon pour un total de 64%. L’électricité crée à partir d’énergie renouvelable représente 25,5 % de la production (les 10,5% restants concernent le nucléaire et les déchets non renouvelables).

Si l’on fait abstraction de l’aspect environnemental, concernant un véhicule électrique de transport, le meilleur rendement global est obtenu avec une propulsion directement électrique (train, trolleybus, tramway…).

Si le véhicule ne peut pas être alimenté directement par le réseau, le second meilleur rendement est obtenu avec une alimentation par batterie. En raison des pertes occasionnées par les différentes étapes nécessaires à la fabrication du dihydrogène, le moins bon rendement concerne le véhicule dont la pile à combustible alimentée par du dihydrogène assure la propulsion électrique.

Par Florian Fèvre CC BY-SA

L’avantage du trolleybus est d’offrir un bon rendement énergétique, il s’insère dans la circulation sans nécessiter d’infrastructures au sol. L’inconvénient est qu’il est lié à un réseau de caténaires aériens au moyen d’un pantographe.

Une voiture thermique nécessite 20 kg de cuivre, un véhicule électrique 90 kg, un autobus 370 kg… de toute manière, la planète ne dispose pas d’assez de matières premières pour électrifier tous les véhicules et éradiquer le moteur thermique.

De plus, on sait aujourd’hui que pour l’instant, le bilan carbone global du puits à la roue (c’est-à-dire de l’extraction des matières premières à la fin d’utilisation) d’un véhicule électrique est équivalent à celui d’un véhicule thermique.

Par Pymouss CC BY-SA

Plus libre dans ses déplacements, un bus doté de batteries doit être fréquemment rechargé afin d’assurer une autonomie suffisante. La recharge rapide lors d’un arrêt, évite une immobilisation de longue durée en dépôt.

Le dihydrogène est cependant un excellent moyen pour stocker une production excédentaire d’électricité.

Le carburant dihydrogène a un gros inconvénient, il nécessite un volume de stockage important peu compatible avec les véhicules particuliers. Une partie de la solution viendra certainement du développement des véhicules les plus aptes à embarquer suffisamment de dihydrogène pour obtenir l’autonomie souhaitée.

La mobilité électrique est grande consommatrice de matières premières : terres rares, cuivre, lithium, platine… avec les dégâts humains et environnementaux liés à leur exploitation qui en découlent.


Par Sémhur  CC BY-SA

Extraction manuelle du soufre, transport à dos d'homme. Il serait pertinent que les pays industrialisés, sous prétexte de dépolluer leur espace particulier, n’en fassent payer le prix aux pays en voie de développement.


La Pile à Combustible

La pile à combustible est un générateur de courant électrochimique qui fonctionne par oxydation du dihydrogène.

La pile à combustible à membrane polymère PEMFC (proton exchange membrane fuel cells) est actuellement la pile la plus développée pour toutes les applications concernant la mobilité.

Les piles à combustible PEMFC fonctionnent à basse température. Leur rendement est d’environ 50%. Si elles sont alimentées à partir de dihydrogène elles ne rejettent que de la vapeur d’eau dans l’atmosphère.

Par Nécropotame CC BY-SA

L’électrolyse de l’eau. Lorsqu’on plonge deux électrodes alimentées en courant continu dans de l’eau, l’oxygène qu’elle contient se concentre sur l’anode, le dihydrogène sur la cathode.

Grâce à un dispositif plus complexe, le phénomène est réversible : c’est la pile à combustible.


La pile à combustible produit de l’électricité à partir d’une réaction chimique. La réaction est provoquée par le passage du dihydrogène (hydrogène) sous forme de gaz à travers l’anode, alors que le dioxygène (oxygène) contenu dans l’air circule dans la cathode.

Un électrolyte permet l’échange des charges électriques. Le courant électrique est issu du flux d’ions qui traversent l’électrolyte.

Chaque cellule produit une tension relativement faible de 1,23 volts qui est mesurée à courant nul. Elles sont donc montées en série de manière à constituer un module atteignant la tension souhaitée.

 


andré abadia CC BY-SA

Au cœur de la pile, l’oxydation du dihydrogène et la réduction du dioxygène produisent du courant électrique, de l’eau et de la chaleur :

H2 + ½ O2 > H2O + Wélectrique + ΔQ

 

En fonctionnement, la température d’une pile à combustible PEMFC se situe entre 50 et 100 °C, ce qui lui confère un temps de démarrage réduit (elle doit atteindre sa température de fonctionnement à partir de la température ambiante le plus rapidement possible). Après réchauffement, elle est opérationnelle à des températures extérieures négatives d’environ -30 °C.

Les équipements auxiliaires nécessaires sont nombreux et d’une technologie élaborée. Ils concernent l’alimentation en carburant (le dihydrogène) et en comburant (le dioxygène), le dispositif de refroidissement, la gestion des rejets, l’exploitation de l’électricité produite.

 


CC BY-SA

Pour fonctionner, la pile à combustible nécessite, dans son environnement, un dispositif relativement complexe.


Les caractéristiques de puissance fournie par la pile en fonction du rendement permettent de faire des choix en rapport avec la destination de la pile.



 CC BY-SA

Sur un véhicule routier la puissance usuelle sera choisie au point A de manière à conserver un rendement acceptable d’environ 55%. Cela permet de disposer d’une puissance plus importante en cas de besoin tout en acceptant une perte de rendement au point B. L’intensité est directement dépendante du débit d’hydrogène consommé.


Concernant la mobilité, les recherches se sont prioritairement orientées sur le développement des piles à combustible PEMFC. Ce sont les mieux adaptées pour fournir suffisamment d’électricité aux véhicules automobiles, au transport routier et aux bus. Les chariots élévateurs et dans une moindre mesure les engins de travaux publics et agricoles font également l’objet d’expérimentations. Le transport maritime et fluvial est aussi concerné au même titre que les sous-marins.


Par Jacek Rużyczka CC BY-SA

Le train est apte à transporter une quantité importante de dihydrogène, la pile à combustible peut remplacer le moteur diesel pour des lignes non électrifiées. La transformation est relativement aisée car les trains qui utilisent un moteur thermique sont déjà à propulsion électrique.


On sait que lorsque la pile à combustible est alimentée grâce à du dihydrogène elle ne rejette que de la vapeur d’eau. Le véhicule est dans ce cas totalement dépourvu de rejets polluants du réservoir à la roue. Si l’on produit du dihydrogène à partir d’électricité renouvelable le transport sera non polluant du puits à la roue.

Si l’usage d’un combustible gazeux peut présenter un inconvénient pour de petits véhicules légers (en raison de l’espace occupé par les réservoirs), ce désavantage est réduit dès lors qu’il s’agit d’un mode de transport en commun comme les bus.


 

par Spsmiler CC BY-SA

Dans une pile à combustible, contrairement à une batterie, il n’y a pas de stockage interne, l’énergie se trouve à l’extérieur. Dans le cas des bus, les nécessaires réservoirs de dihydrogène sont généralement situés sur le toit.

 

Le déplacement de fret par camions pose le problème de la vitesse de déplacement grande consommatrice d’énergie. La puissance électrique nécessaire induit, dans ce cas, une grande quantité de dihydrogène embarquée.

Le rail, le transport fluvial ou maritime est moins impacté car, par exemple, un wagon supplémentaire dédié au carburant peut facilement être ajouté à la rame.

Par rapport à d’autres piles à combustible au concept différent, la pile à combustible PEMFC a une masse réduite, sa faible température de fonctionnement lui permet une réponse rapide, sa fabrication est des moins onéreuses. L’utilisation d’électrolyte solide permet de réduire la corrosion et d’allonger sa durée de vie. Elle a des possibilités de puissance élevées.

La chaleur évacuée représente une partie des pertes. Sur un véhicule elle peut être utilisée l’hiver pour chauffer l’habitacle. Sur des installations de forte puissance, à poste fixe dont la pile fonctionne à température élevée, la chaleur peut être valorisée à plus grande échelle.

Indépendamment du mode de propulsion, il faut prendre en compte, qu’à partir de la roue, il y aura des émission de particules fines dues à l’usure des pneumatiques, de l’asphalte, ainsi que du système de freinage. En ville, ces particules présentent l’inconvénient d’être mises en suspension à chaque passage de véhicule. Elles sont propices à être inhalées notamment par les enfants qui sont de petite taille.


CC BY-SA

Les piles à combustible sont fabriquées à partir de composants rares et onéreux comme le platine qui entre dans la composition du catalyseur. Dans la chaîne d’alimentation électrique, la batterie n’est pas indispensable. Cependant, elle permet de récupérer l’énergie générée par la force de freinage pour la restituer au moment du démarrage ou sous forme d’accélération.

 

Le catalyseur de la pile à combustible PEMFC utilise du ruthénium qui est un sous-produit de l’extraction de métaux précieux et du platine. Le platine, coûte, suivant sa cotation, environ 30 000 €/kg. Le platine est pour l’instant incontournable et ses ressources sont limitées.

À l’heure actuelle, le prix d’une pile à combustible n’est pas compétitif. Il pourrait l’être à partir d’une production massive, mais se posera alors le problème des ressources des matières premières la constituant.

Les puissances des piles à combustible vont de quelques watts à plusieurs mégawatts.

80% du coût d’une pile à combustible dépend du platine et de la membrane. La production en masse est susceptible de réduire le coût des composants mais pas celui du platine dont le prix risque d’augmenter en même temps que la demande.



Par Rhode Elaine domaine public

Exploitation minière de platine. Le platine est essentiellement issu de l’extraction minière. Il provient également du recyclage des pots catalytiques des moteurs thermiques.

Dans une pile à combustible, il faut environ 0,25 g de platine par kW d’énergie fournie.


Dans une pile à combustible PEMFC le dihydrogène utilisé doit être exempt de monoxyde de carbone car il détruit le platine. L’oxygène transporté par l’air ne doit pas contenir d’huile qui pourrait provenir du compresseur, par exemple, car elle détruit la membrane.

Le rendement des piles à combustible à basse température est inférieur à celui des hautes températures. Elles sont, de plus, beaucoup plus sensibles aux polluants.

La pile doit fonctionner à une température positive et ne doit pas dépasser 80 à 90 °C.

La température doit donc être régulée au moyen d’un circuit spécifique qui permet de la réchauffer au moment du démarrage ou de la refroidir en cours de fonctionnement.

L’oxygène doit être exempt d’impuretés l’air admis doit donc être dépollué.

Selon les prévisions, le prix de revient d’une pile à combustible réservoir compris sera à l’horizon 2040 environ 4 fois plus cher que celui d’un moteur thermique. En complément d’autres énergies, ce sera le prix qu’il faudra transitoirement assumer afin de décarboner la planète.

Une pile à combustible permet d’effectuer 100 km avec une consommation de 1 kg de dihydrogène.

Les progrès à réaliser concernent le rendement, le prix, la sécurité, l’intégration des systèmes, la place occupée, l’origine du dihydrogène.

La masse des équipements embarqués est également un facteur important qui impacte toutes les forces qui s’opposent au déplacement (force de traction, force due à la pente, force due à l’accélération, force de guidage). La force nécessaire au ralentissement et au freinage constitue une énergie non négligeable qui est généralement récupérée et stockée dans les batteries d’appoint (mais elles impactent la masse du véhicule).

En 2011, la France était au 5ème rang mondial en matière de dépôt de brevets concernant le dihydrogène, les leaders sont le Japon puis les USA.

Le prix du dihydrogène est lié à celui de l’énergie renouvelable. Par ailleurs, si l’on peut compter sur le fait qu’une production de masse fera baisser les coûts, il n’en reste pas moins que les matières rares le deviendront davantage ce qui fera augmenter leur prix donc celui de la pile à combustible.

Économiquement le bénéfice du dihydrogène décarboné produit à partir d’énergie renouvelable a un impact direct sur la santé, notamment celle des citadins. En dehors de l’aspect moral, le maintien en bonne santé de la population représente des économies considérables à l’échelon national et planétaire.

La production locale de dihydrogène présente l’avantage de limiter l’importation de combustibles fossiles qui, en plus de leur utilisation, génèrent de la pollution pour leur acheminement.

Quelle que soit l’énergie développée, le recyclage fait défaut, il est très insuffisant. Pour l’instant le recyclage des éoliennes qui arrivent en fin de vie, des batteries, des panneaux solaires… n’a pas été suffisamment anticipé.



 par D&amp RG Railfan CC BY 3.0

Résidus abandonnés après l’exploitation d’une mine.

Dès qu’une nouvelle énergie si verte soit elle apparaitra, se posera le problème des nuisances et des déchets qui lui reviennent.

 

À moyen terme, un seul mode de production d’énergie renouvelable est hors de portée. La pile à combustible à hydrogène est abusivement présentée au grand public comme une panacée. Cependant, son développement doit nécessairement se poursuivre en complément d’autres modes transitoires de production d’énergie.

À l’échelon mondial, les besoins en énergie, notamment électrique sont considérables. Faire croire à un remède universel est une supercherie. Il est malhonnête de fixer des échéances en suggérant que l’on pourra se passer totalement des moteurs thermiques, alors que les solutions de remplacement ne sont pas encore opérationnelles.

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